Le développement d’un nouveau véhicule (moto, voiture particulière, autobus, autocar, utilitaire léger ou lourd, poids-lourd) nécessite de nombreux essais acoustiques. Il s’agit d’assurer un niveau de confort adéquat dans l’habitacle (réduction de la fatigue auditive des passagers, qualité perçue) aussi bien que de minimiser l’empreinte environnementale des véhicules (bruits de passage, de chaîne de propulsion…). Il peut également être question de respect de la réglementation (émissions sonores).
ESSAIS EN INSTALLATIONS DÉDIÉES
Pendant les étapes amont du développement, l’utilisation de bancs d’essais permettant de tester tout ou partie des véhicules est privilégiée. Pour l’acoustique, on utilise notamment des chambres anéchoïques (ou « chambres sourdes ») et des chambres réverbérantes.
Dans une chambre anéchoïque, les parois absorbent les ondes sonores, en reproduisant ainsi des conditions de champ libre. On y effectue des essais de directivité ou de bande-passante, mais aussi de l’identification de sources sonores (formation de voies – beamforming) ou de mesure de puissance acoustique.
Dans une chambre réverbérante, plus rarement utilisée pour les activités automobiles, le but est de créer un champ acoustique diffus. On le génère avec les multiples réflexions des ondes sonores sur les parois, créant ainsi un champ de pression acoustique uniforme.
Pour les études d’aéroacoustique (bruits d’origine aérodynamique, c’est-à-dire créés par un écoulement d’air), on utilise des souffleries dont la veine est traitée de façon semi-anéchoïque.
MESURES ACOUSTIQUES IN SITU
Dans le cas d’essais réalisés dans des installations dédiées, les conditions environnementales sont parfaitement contrôlées. On obtient ainsi un nombre connu et limité de paramètres d’étude ou d’influence. Cependant, les conditions d’essais sont très simplifiées par rapport à celles que subit le véhicule lors de son utilisation en conditions réelles (vent latéral, pluie, neige, turbulence générée par d’autres véhicules, influence du revêtement de la route, état de charge du véhicule, attitudes à cabrer ou à piquer selon qu’on accélère ou freine…). Ceci peut générer des différences sensibles dans les résultats obtenus et occasionner, par exemple, des plaintes de clients pour le produit final. De plus, il peut être compliqué d’installer certains véhicules dans ces installations, pour des raisons de place (semi-remorque par exemple). Pour toutes ces raisons, il est nécessaire d’effectuer des mesures en conditions réelles d’utilisation, le plus souvent en extérieur.
MESURES RÉGLEMENTAIRES DE NIVEAU DE BRUIT
La première catégorie de mesures est celle, réglementaire, d’étude du niveau sonore. On utilise à cet effet des sonomètres étalonnés et certifiés, comme les Larson Davis 821 et 831C. Lorsque ces appareils sont tenus en main, on peut effectuer des mesures rapides et limitées dans le temps. Cependant, il faut s’assurer que l’opérateur de mesure n’influence pas celle-ci. Les sonomètres sont en effet couramment utilisés avec des microphones à champ diffus, dits aussi à réponse omnidirectionnelle. Il est donc facile « d’entendre » la personne qui tient l’appareil pendant la mesure. On évitera également de travailler sous la pluie, générant un bruit blanc large bande de niveau mal contrôlé. Le vent peut également perturber de façon importante sur le signal mesuré ; pour minimiser son effet, on installe sur le microphone une bonnette anti-vent.
Sur ces mesures normatives, on installe souvent l’appareil au sein d’une station de surveillance permanente ou déplaçable. Une étude préliminaire à l’installation doit être menée notamment pour déterminer l’emplacement et les éventuelles perturbations. L’installation devra être assez proche de la source sonore (par exemple, placée en bord de piste ou dans la salle d’homologation) mais devra éviter les zones fortement exposées au vent, les arbres, la présence d’évents ou d’équipements bruyants ne faisant pas partie du champ de mesure, etc… Les éléments perturbateurs pouvant se trouver à proximité peuvent également être régis par une norme ou la régulation en termes de puissance d’émission sonore ou de distance au point de mesure. La possibilité de perturbations volontaires (par exemple un quidam criant à côté de la station de mesure) doit également être prise en compte.
Il est également important de vérifier que les accessoires permettant de réduire l’influence de ces paramètres perturbateurs sont correctement installés : pic anti-oiseaux, dispositifs de réduction de l’humidité dans les bonnettes, dispositifs anti-vandalisme, etc…
Enfin, quelle que soit la configuration, on utilisera du matériel adapté à la mesurande, vérifié, utilisé selon les procédures adaptées. Un étalonnage régulier doit être effectué sur le matériel ; la fréquence est déterminée par l’usage ou la réglementation.
R&D EN ACOUSTIQUE : MESURES EN CONDITIONS RÉELLES
Pour les mesures orientées Recherche & Développement, on utilise des microphones, éventuellement combinés à des capteurs de pression ou des accéléromètres (mesures multi-physiques). Les mesures acoustiques peuvent être menées à l’intérieur du véhicule (bruit d’habitacle) comme à l’extérieur (identification de sources de bruit – formation de voies, mesures acoustiques d’un élément particulier, mesures sous caisse, bruit de passage, bruit d’origine aérodynamique…).
Lorsque le microphone est installé à l’intérieur, on peut considérer qu’il est protégé pendant la mesure. Il s’agira de vérifier qu’il n’y a pas de source sonore autre que celle que l’on veut mesurer (bip ceinture, radio, alarmes…). Le type de microphone (champ libre ou champ diffus) revêt alors toute son importance. Il faut toutefois s’assurer que les conditions de stockage et d’utilisation (température et humidité notamment) sont conformes à la fiche technique. Les chocs éventuels (chutes) constituent le principal risque de détérioration de l’équipement.
Lorsque le microphone est installé en extérieur, on suit les mêmes précautions que dans le cas d’une installation à poste fixe ou avec un sonomètre. En complément, il convient de faire attention aux projections diverses. En particulier, on doit protéger le microphone contre les projections d’eau pouvant provenir de la chaussée ou de poussières diverses. L’utilisation de microphones spécifiques comme le modèle 130A24 de PCB Piezotronics, classifié IP55 (protection eau et poussière), peut faciliter les opérations.
En effet, ce type de microphone est plus robuste et il dispose d’une protection de membrane remplaçable. Après cette opération, une recalibration n’est pas nécessaire.
Si l’on considère enfin des mesures aéroacoustiques, leur forte dépendance aux conditions d’écoulement amont (turbulence, couche limite atmosphérique, angle d’incidence du vent…) rend un diagnostic simultané des conditions d’écoulement absolument nécessaire, faute de quoi toute corrélation serait très délicate voire impossible. On pourra donc à cet effet combiner les mesures acoustiques avec des mesures de pression instationnaire par exemple.
Plus encore que les mesures en banc d’essais, les essais en conditions réelles et à l’extérieur nécessitent une approche globale et multiphysique. Pour cette raison, il est indispensable d’intégrer l’instrumentation à la réflexion globale autour de l’essai.
Pour en savoir plus, rendez-vous sur : Mesures acoustiques en extérieur
Article écrit par : Guillaume Bonnavion, Expert Mécanique des Fluides, Aérodynamique, Acoustique est Chef de Marché Automobile, Enseignement et Recherche chez PCB Piezotronics SA
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